Télétravail : des salariés libérés, délivrés… Vraiment ?
La crise sanitaire et les différents confinements ont entraîné un recours massif au télétravail des entreprises et de leurs salariés. Si les grands confinements ne semblent plus d’actualité, le goût des salariés pour le télétravail reste prononcé. Rappelons quelques éléments sur le télétravail et sa mise en place dans une entreprise.
Depuis 2017, le télétravail désigne toute activité professionnelle exercée en dehors des locaux de l’entreprise en utilisant les technologies de l’information et de la communication. Il ne prend donc pas nécessairement place au domicile du salarié. L’employeur peut avoir recours au télétravail dès lors que celui-ci est possible (seuls 36% des actifs estiment pouvoir télétravailler sans difficulté) et qu’il n’entrave pas le bon fonctionnement de l’activité. Les droits des salariés doivent aussi être assurés. Correctement mis en place, le télétravail peut apporter un gain de temps et de productivité significatif.
Mise en place du télétravail : le fruit d’un accord bilatéral
Sur le terrain du télétravail, entreprises comme salariés ont des droits et des obligations.
Un accord requis avec le salarié
Le télétravail ne peut pas faire l’objet d’un accord unilatéral : entreprises et salariés doivent trouver un terrain d’entente à sa mise en place.
Le télétravail ne peut pas être imposé à des salariés. En revanche, un salarié a le droit de proposer sa propre mise en télétravail, en particulier si celui-ci lui apporte des avantages clairs : gain de temps, meilleure organisation de la vie personnelle ou professionnelle, etc.
L’entreprise a le droit de refuser le télétravail, mais son refus doit être motivé. Elle pourra par exemple mettre en avant l’absence de locaux disponibles pour l’exercice de l’activité. L’entreprise peut contrôler le lieu envisagé afin de s’assurer que celui-ci est aux normes, y compris en cas de télétravail au domicile.
Elle peut aussi arguer du coût de cette forme de travail, l’achat de matériel nécessaire à la mise en télétravail pouvant représenter une dépense importante. Le salarié et l’entreprise peuvent négocier la mise en place d’une allocation télétravail. Celle-ci financera les achats indispensables, comme un ordinateur, une imprimante ou un bureau. Ce n’est toutefois pas un droit pour le salarié, ni un devoir pour l’entreprise.
Quel rôle pour la charte d’entreprise ?
Une charte d’entreprise est recommandée aux entreprises envisageant le télétravail. Elle favorise une mise en place rapide et cadrée du télétravail ainsi qu’une plus grande maîtrise des coûts.
Cette charte non obligatoire, créée par l’employeur qui peut aussi consulter le Conseil Social et Economique (CSE), pourra préciser toutes les informations utiles au télétravail, comme :
- Le matériel fourni
- La méthode choisie pour l’acquisition de ce matériel : le salarié peut utiliser son propre matériel pour le télétravail, avec l’accord de son entreprise. L’employeur peut aussi lui verser une allocation pour s’équiper, directement sur salaire ou via une plateforme comme Télétravail Edenred. Une telle allocation est exonérée d’impôts et de cotisations sociales pour l’employeur, jusqu’à 550€ par an et par télétravailleur
- Le lieu de travail : le télétravail peut être exercé depuis l’étranger ou depuis un espace de coworking
- Les obligations du salarié, comme les temps de travail et les horaires auxquels il doit être disponible.
Selon les chiffres fournis par la DARES en 2019, 25% des télétravailleurs se trouvaient dans une entreprise ayant mis en place un accord collectif. 22% avaient fait l’objet d’un accord individuel.
Travailleur à distance, un salarié comme les autres
L’entreprise doit assurer à ses télétravailleurs les mêmes droits qu’à ses employés en présentiel. De leur côté, les personnes en télétravail doivent se conformer à certaines obligations.
Des droits communs au présentiel
Dans un souci d’égalité entre travailleurs sur-site et à distance, l’entreprise doit assurer à l’ensemble de ses salariés :
- un accès à la formation identique
- les mêmes possibilités d’évolution de carrière
- un même accès aux activités sociales de l’entreprise
- les mêmes droits à des avantages hors salaire comme les titres-restaurant
L’entreprise a aussi l’obligation d’assurer une protection de la vie privée des salariés en télétravail, notamment par l’installation de logiciels sécurisés. Elle a la possibilité de contrôler l’espace de télétravail.
Les droits et devoirs induits par les ordonnances Macron de 2017
En septembre 2017, une série d’ordonnances modifiant le format du télétravail a été adoptée, apportant des dispositions simplifiant la mise en télétravail.
L’un des principaux changements de ces ordonnances tient à la régularité du télétravail. En cas de télétravail régulier, il devient obligatoire de l’inscrire dans un accord collectif ou une charte. Si le télétravail est ponctuel, l’accord peut être formalisé par tout moyen, y compris oral. Les avenants au contrat ne sont plus nécessaires.
Dans le cas où une charte ou un accord collectif sont écrits, ceux-ci devront notamment comprendre :
- les conditions de passage au télétravail et de retour au présentiel
- ses conditions de mise en œuvre
- les méthodes de contrôle du temps de travail
- les périodes de disponibilité du salarié.
Dernier changement important : l’entreprise n’est plus légalement obligée de fournir le matériel à ses salariés. Elle doit toutefois leur fournir des conditions de travail semblables à celles des salariés en présentiel.
Télétravail n’est pas synonyme de totale liberté pour les salariés ! Les droits et les devoirs d’un salarié en télétravail dépendent en partie de son entreprise. Celle-ci a le pouvoir d’encourager cette pratique, notamment à travers sa charte. Le salarié doit être volontaire pour exercer son activité sous ce format. Il s’agit donc d’une décision bilatérale qui ne peut pas lui être imposée. Dans le même temps, la mise en télétravail d’un salarié ne remet pas en cause les droits dont il jouissait en présentiel.