Irène Gazel est DRH du Conseil Régional Rhône-Alpes, qui compte 6,700 agents. Elle nous explique sa politique en matière de santé des collaborateurs.
Manager Attitude : Combien de salariés emploie le Conseil Régional Rhône-Alpes ?
Irène Gazel : Le Conseil Régional emploie 6,700 salariés, dont une grande majorité d'agents de catégorie C, c'est-à-dire des postes d'exécution. La plupart travaillent dans les lycées.
Manager Attitude : Quelle place occupe la santé dans votre politique des ressources humaines ?
Irène Gazel : Jusqu'en 2010, la politique de santé était essentiellement relayée par les ACMO (Agent Chargé de la Mise en Œuvre des règles d'hygiène et de sécurité). Avec le transfert en 2006 des ATOS (Agents technique ouvrier et de service), les effectifs ont plus que triplé. Nous avons donc créé un service santé prévention médiation. Il comprend une personne chargée de la médiation, qui travaille notamment sur la prévention des risques psychosociaux, et des ingénieurs prévention sur les risques professionnels et la lutte contre les addictions.
Nous travaillons en lien avec des prestataires externes : médecins du travail, psychologues, assistantes sociales, ergonomes… Ce dispositif nous permet de mener les actions quotidiennes en matière de santé, mais aussi des projets de prévention plus structurants.
Manager Attitude : La santé des salariés compte donc parmi les premières priorités des RH ?
Irène Gazel : Oui, si ce n'est la première, et ce, pour deux raisons. D'abord parce que l'employeur est tenu par la loi de préserver l'intégrité physique et psychique de ses collaborateurs. Par exemple, il doit fournir des équipements individuels de sécurité.
La santé des collaborateurs est déterminante pour le bon fonctionnement de l'entreprise
Ensuite, d'un point de vue managérial, la bonne santé des collaborateurs est déterminante pour le bon fonctionnement de l'entreprise. Des salariés en bonne santé sont plus motivés, plus investis dans leur travail sur la durée, sans parler des questions d'absentéisme.
Pour autant, l'investissement dans la santé de ses salariés est difficilement quantifiable, même si l'on dispose de quelques indicateurs.
Manager Attitude : Les problèmes de santé sont-ils plus importants aujourd'hui qu'il y a quelques années ?
Irène Gazel : Nous assistons à une montée statistique des risques psychosociaux. Elle est liée, en partie, aux différents décrets visant à impulser une politique de prévention de ces risques, ainsi qu'à la médiatisation de certains événements dramatiques dans de grandes entreprises, qui conduit certains salariés à en parler. Les TMS (Troubles musculosquelettiques) occupent également une place importante.
Par ailleurs, même si c'est moins vrai dans la fonction publique, face au risque du chômage, certains salariés peuvent développer des stratégies pour conserver leur emploi, au détriment de leur santé.
Enfin, de plus en plus, nous rencontrons des personnes isolées pour lesquelles l'employeur est le seul recours en matière de santé.
Pour certaines personnes, l'employeur est le seul recours en matière de santé
Manager Attitude : Comment établir la frontière entre ce qui relève du travail et ce qui appartient à la vie privée ?
Irène Gazel : C'est une vraie question que se posent de nombreux DRH. Nous avons choisi de toujours aborder la question de la santé sous l'angle du travail quitte à inciter la personne à se faire prendre en charge si nous détectons des problèmes. Mais l'employeur n’est pas tout puissant… et ne peut pas être omniprésent dans la vie de ses collaborateurs.
Manager Attitude : Comment aborder la question de la santé au travail ?
Irène Gazel : Il faut trouver le bon équilibre entre ce qui relève de la problématique individuelle du collaborateur et ce qui dépend du collectif. Les deux sont en général imbriqués. Le risque est toujours de négliger le champ des relations professionnelles et l'impact du travail sur la santé des collaborateurs.
C'est pourquoi il faut un regard bienveillant de toute l'organisation sur ces questions de santé. Et une approche pluridisciplinaire, pour disposer d’une double entrée : individuelle et collective.
Photo © Région Rhône-Alpes /Hervé Hugues