Trois étudiants ont eu l’idée de créer La Cravate solidaire en 2012. Leur objectif : permettre à des personnes démunies ou désorientées face à la recherche d'emploi d'aller passer un entretien d'embauche correctement vêtues… et avec confiance en soi.
L’habit fait le moine. Il ne sert à rien de nier la place importante qu'occupe, dans les recrutements, la conformité des candidats aux normes socialement admises. Le Défenseur des Droits a d’ailleurs identifié l’apparence physique comme un facteur important de discrimination à l’embauche. D’où la mission que s’est fixée l’association La Cravate solidaire : travailler sur l’acquisition des codes vestimentaires – mais aussi comportementaux, nécessaires lors d’un entretien d’embauche.
Tenue correcte exigée
En dehors des entreprises où le port d’un uniforme ou de vêtements professionnels est de rigueur, le dress code s’est largement assoupli ces dernières années dans les bureaux : les mornes costumes-cravates sombres, et les tristes tailleurs-chemisiers se raréfient. Le mouvement commence souvent par le vendredi – devenu casual day, avant de conquérir les autres jours de la semaine. L’annonce officielle par la banque Goldman Sachs, le 5 mars dernier, qu’elle autorisait désormais à ses employés des tenues moins formelles, donne ainsi la preuve, sinon d’un changement de mentalités de l’équipe de direction, mais du moins de son pragmatisme face aux comportements de ses plus jeunes talents.
Les codes vestimentaires restent néanmoins le reflet du bon sens : « une apparence soignée, des vêtements propres, en bon état, plutôt classiques, et une note originale ou fantaisiste n’est pas rédhibitoire » explique Frédéric Guyet, directeur d’un site logistique dans l’Essonne.
Mais en entretien d’embauche, les enjeux sont tels qu’il ne faut pas se tromper : « les candidats sont jugés à « 55% sur leur apparence, à 38% sur leur gestuelle et à seulement 7% sur leurs propos », illustre ainsi Virginie le Cozic, spécialiste du relooking.
« L’habit ne fait pas le moine mais il y contribue »
L'habit ne fait pas le moine… mais il y contribue sérieusement : c’est le leitmotiv des trois fondateurs de Cravate Solidaire : Yann Lotodé, Jacques-Henri Strubel et Nicolas Gradziel, qui ont pris conscience que les jeunes des quartiers autour d’eux étaient bien loin des codes attendus par les recruteurs en termes vestimentaires mais aussi de savoir-être.
L’idée alors pris forme, avec à la clé un succès retentissant, dans un réseau qui compte aujourd’hui près de 200 bénévoles, 250 partenaires institutionnels ou privés, et une dizaine d’antennes en France. D’un côté, une action de collecte de vêtements en entreprise ; de l’autre, l’accompagnement direct de demandeurs d’emploi à travers des ateliers comprenant une séance de relooking et d’appropriation de la tenue mais aussi un temps de préparation de l’entretien et de valorisation de leurs parcours. A la clé, un entretien blanc mené par de vrais recruteurs. L’habit devient alors prétexte à un travail plus approfondi sur soi.
« On voit des gens qui ont subi tellement d'échecs qu'ils ne savent plus se mettre en valeur. On est là pour les booster, raconte Aurélie, bénévole au Mans. J'ai vu des gens arriver avec la confiance au ras du sol et repartir en se voyant gagnants. C’est la base. L'idée est vraiment de restaurer la confiance en soi du demandeur d'emploi.»
Team Building solidaire
La Cravate Solidaire a établi une relation privilégiée avec de nombreux grands groupes qui s’engagent à ses côtés. Elle propose dorénavant des ateliers de team building « Parcours Cravate » pour sensibiliser sur les barrières à l’emploi et sur les préjugés liés à l’image.
Frédéric Guyet porte un regard intéressé sur cette initiative qui « peut apporter de la cohésion entre salariés, sans parler de l’apport non négligeable en termes de RSE pour les entreprises ». Et se surprend même à imaginer un challenge inter-services pour récolter des dons de vêtements. Une idée à suivre !