Edenred France avait donné rendez-vous à une trentaine de managers au château des ducs de Bretagne, le 18 juin dernier. Le thème de cette rencontre à Nantes : valoriser les hommes. L’historien d’art Stéphane Coviaux revient sur ce que nous avons pu voir – et comprendre.
A la découverte d’un chef d’œuvre flamand
Le musée des Beaux-Arts de Nantes possède une très belle collection de natures mortes flamandes et hollandaises du XVIIème siècle. Parmi elles, le tableau de l’anversois Pieter van Overschie apparaît comme un chef d’œuvre.
Sur un plan de table s’étalent dans un savant désordre, fruits, plats, verres et nappes retroussées. Le rendu des matières est remarquable de virtuosité : l’étain, le verre, la peau des agrumes, la chair translucide des raisins, l’éclat des grains de grenade donnent l’illusion de la réalité.
Les couleurs atteignent des sommets de raffinement et de délicatesse, et la composition est savamment équilibrée. Tout est là pour ravir l’œil du spectateur. Mais il semble que l’œuvre veuille nous emmener au-delà de cette séduction.
Pourquoi cet amoncellement d’objets qui laissent imaginer un repas brusquement interrompu ?
Les fruits semblent plus frais à gauche, et plus mûrs à droite. Les couleurs sont printanières d’un côté, et automnales de l’autre. N’y aurait-il pas là une échelle du temps propre à évoquer le passage de la jeunesse à la vieillesse, prélude à une inexorable chute ?
Nous entrons alors dans l’interprétation du tableau comme une « Vanité » qui, tout en représentant les beautés de l’existence terrestre, renvoie le spectateur au caractère éphémère de la vie et donc à la nécessité de choix existentiels.
De la peinture au management
Le thème de cette soirée au château des ducs de Bretagne (qui abrite actuellement les collections flamandes et hollandaises du musée des Beaux-Arts de Nantes) était « valoriser les hommes ». Beaucoup s’attendaient à ce que le contenu des œuvres constitue la source de notre réflexion. La curiosité était grande, tant la thématique paraissait éloignée des tableaux observés (natures mortes et dernière Cène). La réponse vint dans le « Regard sur Atelier » qui fut une relecture, non pas des tableaux, mais de la conduite de la visite.
C’est en effet au travers de la pédagogie employée que les intervenants ont permis une véritable « valorisation » des ressources internes au groupe. Ces ressources mobilisées étaient nombreuses :
- La capacité d’observer,
- de se concentrer,
- de ressentir,
- d’intervenir,
- d’écouter,
- de réfléchir…
Pour permettre cette valorisation individuelle et cette création de valeur collective , les intervenants ont associé deux modes de management différents :
- La position haute : en étant directif sur les étapes de la soirée, en posant un cadre et une direction - déplacements, succession et structuration des temps d’observation et d’échange.
- La position basse: en donnant une grande liberté de parole et d’interprétation au groupe.
La position basse est très inhabituelle dans le cadre d’une approche des œuvres d’art. Classiquement, l’intervenant est un sachant qui délivre une information descendante à un public passif. A l’inverse de ce schéma, la conduite des visites a généré l’implication, la participation, la créativité, la responsabilisation et l’intérêt de chacun.
Grâce au détour par l’art, les participants se sont retrouvés de façon inattendue face à des problématiques de management parfaitement contextualisables en entreprise.
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Stéphane Coviaux est le fondateur des Ateliers du Regard. Il propose aux entreprises des activités de cohésion d’équipe, des événements d’entreprise et des formations managériales, fondés sur une approche nouvelle de l’art. Il est l’auteur d’un livre sur les Annonciations de Fra Angelico (Devant l’Epouse, éditions Médiaspaul, collection les Jardins du Regard), et de nombreux articles d’analyse d’œuvres d’art.