Aucune TPE, aucun indépendant ne sont à l’abri d’un contrôle fiscal. Voici donc quelques « dispositifs » pour protéger vos biens personnels, en cas de redressement important pour lequel la trésorerie professionnelle ne suffirait pas.
Chaque année, l’état contrôle fiscalement entre 45.000 et 50.000 entreprises (contre environ 900.000 particuliers), et il est presque normal de s’attendre à être un jour concerné, même quand on est un petit patron. C’est pourquoi nombreux parmi vous s’interrogent, non sans crainte, des risques qui pèsent, en cas de contrôle fiscal avec redressement, pour leur patrimoine personnel.
Première chose à savoir : les contrôles fiscaux ne sont pas (tous) faits par hasard et certains facteurs ont un effet déclencheur. Par exemple : une incohérence dans vos déclarations fiscales, l’absence de certaines déclarations, des crédits de TVA importants ou le recours au CIR (Crédit Impôt Recherche). Et lorsque l’administration fiscale se penche au chevet d’une entreprise, il n’est pas rare qu’elle se penche aussi sur la situation fiscale personnelle de son dirigeant, pour ce qu’elle appelle « un examen contradictoire » (Voir encadré 1).
Limiter la responsabilité du dirigeant via la forme juridique
Ensuite, sachez qu’il existe plusieurs dispositifs pour protéger votre patrimoine :
Premier dispositif : la forme juridique de votre activité, choisie au moment de sa création et que vous pouvez modifier en cours de route. Dans les formes juridiques où l’activité professionnelle est soumise à l’IS (Impôt sur les sociétés), le patrimoine du dirigeant est protégé. C’est-à-dire que si votre entreprise subit un redressement fiscal et que sa trésorerie est insuffisante, l’administration fiscale ne peut pas saisir vos biens personnels. Ces formes juridiques protectrices sont les SARL, EURL, EIRL où les responsabilités des associés sont limitées.
Éviter les comptes mixtes et jouer la clarté
Le deuxième « dispositif » relève davantage d’un conseil, à destination des entreprises individuelles, des indépendants et des auto-entrepreneurs, dont les formes juridiques ne permettent pas la protection du patrimoine personnel. Il s’agit de travailler dans la clarté et la transparence, en ayant deux comptes bancaires bien distincts. Un compte pour tout ce qui relève de vos dépenses et revenus personnelles. Et un compte pour les dépenses et revenus liés à votre activité professionnelle : investissements pour l’activité ou pour réaliser les projets de vos clients, encaissements correspondant à des factures émises envers les clients, le tout dans le cadre d’une trésorerie bien tenue. Pour vous rémunérer, si vous êtes dirigeant non-salarié, optez pour cette habitude saine : se verser depuis le compte « pro » des sommes clairement identifiables, par exemple, un montant fixe ou un pourcentage des factures encaissées, une fois par mois. Montant pouvant en outre intégrer des remboursements de frais liés à l’activité professionnelle, avec conservation des factures afférentes, dans un dossier pour l’année en cours et dans des archives, ensuite, à conserver 10 ans.
S’appuyer sur le binôme expert-comptable / centre agréé de gestion
Enfin, troisième « dispositif » : vous adjoindre les services d’un expert-comptable, à minima pour vos comptes annuels, ceux qui permettent de faire la déclaration au fisc des revenus de votre société ou activité, soit au titre de l’IS, soit au titre de l’IR (pour les dirigeants non-salariés). Lui sait exactement ce qui est légal et ce qui ne l’est pas et, comme sa responsabilité est fortement engagée, il ne laisse rien passer. L’expert-comptable vous proposera sûrement d’adhérer à une association de gestion agréée dont le rôle est de vérifier vos déclarations. Avec ces deux tampons, il est fort probable que vous ne voyiez jamais le nez d’un contrôleur fiscal : l’idéal en somme pour protéger vos biens.
L’examen contradictoire : quand le contrôle fiscal de l’entreprise déborde sur la « maison »
Cette procédure est indépendante de celle engagée pour le contrôle fiscal de la société, mais elle peut être menée en parallèle. Elle permet à l’administration fiscale de vérifier la sincérité des déclarations de l'impôt sur le revenu des particuliers (IR), en prenant en compte les revenus déclarés mais aussi leur situation patrimoniale et les éléments de train de vie. Il arrive fréquemment aux dirigeants d'être contrôlés au niveau des comptes dits mixtes, c’est-à-dire utilisés indifféremment à titre professionnel et privé. Le fisc cherche des « erreurs » qui pourrait avoir été commises : par exemple, la TVA déduite des revenus professionnels pour l’achat d’un véhicule à usage privé. En ce cas, le redressement va concerner la TVA mais aussi la réintégration de la dépense au titre de revenu imposable.
Loi Dutreil d’insaisissabilité : le fisc n’est plus concerné !
Depuis le 22 août 2003, la loi Dutreil permet aux entrepreneurs et autres professionnels exerçant à titre individuel leur activité professionnelle, de rendre insaisissable, par leurs créanciers professionnels, leur patrimoine immobilier personnel. Seul le patrimoine immobilier professionnel (local acheté pour l’activité) peut être saisi en cas de dettes engagées professionnellement. A noter que la loi n°2015-990 du 6 Août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances, a rendu cette insaisissabilité automatique. Il n’y a donc plus nécessité de la demander chez le notaire comme auparavant. Cependant, la loi du 6 décembre 2013, relative à la fraude fiscale (loi n° 2013-1117), a entretemps rendue cette déclaration d’insaisissabilité inopposable à l’administration fiscale.