A l’occasion de la douzième édition de l’événement Global RH, Jean-Marie Simon, Directeur général d’ATOS France, Benoît Thieulin, Président du Conseil National du Numérique et Didier Zoubeïdi, Directeur Marketing Edenred France, ont échangé sur les transformations induites par le numérique.
La révolution digitale touche aux relations entre les personnes et à leur manière de penser
L'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a récemment évoqué, au sujet de la digitalisation, une nouvelle révolution industrielle qui serait comparable aux transformations provoquées par la mécanisation ou l’électricité. Pour Didier Zoubeïdi, la révolution digitale est toutefois plus profonde qu’une révolution industrielle, car elle touche fondamentalement aux relations entre les personnes et à leur rapport à la connaissance, donc à leur manière de penser. « Nous sommes en train de vivre une révolution comparable à l’invention de l’imprimerie. A partir du moment où le numérique commence à toucher tous les secteurs, nous prenons conscience de vivre une révolution culturelle et cognitive, et pas seulement économique et industrielle».
Jean-Marie Simon estime que nous vivons actuellement une accélération du phénomène : « Désormais, tout devient obsolète dès l’instant où les usages commencent à être transformés dans un domaine ou un autre. On peut donc bien comparer l’actuelle révolution numérique au choc de l’imprimerie, voire à celui de l’écriture. On assiste à une transformation de nos comportements qui commence dès la plus jeune enfance ».
Le numérique fait réapparaître le « travail hors les murs »
Didier Zoubeïdi relève cependant que le numérique peut faire resurgir des attitudes « d’avant ». Dans l’étude intitulée « Le travail hors les murs », on découvre ainsi que « le numérique fait réapparaître le travail à domicile, qui avait disparu du fait de la révolution industrielle et de la généralisation du modèle du salariat ». Jean-Marie Simon confirme que près de 20 % des collaborateurs d’ATOS France sont en télétravail.
Pour Benoît Thieulin, le premier facteur de transformation des entreprises, ce sont leurs ressources humaines, car les usages privés évoluent plus vite que les organisations : « On a tendance à oublier que les gens, dans leurs usages quotidiens et domestiques, disposent souvent d’un système d’information plus avancé que leur entreprise ! Cette ressource n’est pas forcément facile à assimiler pour les entreprises, puisque leurs contraintes informatiques ou organisationnelles ne sont évidemment pas les mêmes que celles d’un ménage ».
Une gigantesque redistribution des cartes
Le président du Conseil National du Numérique met en évidence la dimension schumpétérienne de la révolution digitale : « On assiste à une gigantesque redistribution des cartes à l’échelle de la planète, dans laquelle les « historiques », ayant accumulé infrastructures, expertise, etc., bénéficient certes d’une prime, mais où de nouveaux acteurs, tels BlaBlaCar, viennent se positionner comme intermédiaires entre le client final et des prestataires de service. Dans ce contexte, tout acteur peut être potentiellement menacé. Les entreprises, comme d’ailleurs les individus, sont aujourd’hui engagés dans une compétition difficile qui les oblige à innover et parfois à repenser leur modèle économique ».
Didier Zoubeïdi admet que la dématérialisation a considérablement changé tous les métiers d’Edenred, de la production à la vente. Il rappelle cependant la place des acteurs historiques dans ce processus : « La leçon de cette expérience, c’est qu’il n’y a pas de fatalité. La clé, pour ne pas rater ce type de virage, est non seulement de l’anticiper mais aussi de le provoquer. Nous avons toujours été, de ce point de vue, extrêmement volontaires, et nous avons devancé les événements ».