Ils ont gardé leur fraîcheur et l'enthousiasme de leurs débuts. Avec l’expérience en plus. Passé cinquante ans, les commerciaux sont au sommet de leur art. Témoignages.
À 57 ans, Didier Freinais ne se pose pas la question de la retraite. Pas plus que son cadet, Raynald Legrand. « Sinon tu es mort en tant que commercial », précise-t-il. Tous deux ont conservé l’énergie de leur jeunesse et l’attachement à ce qui fait le sel de leur métier : la pression du résultat, moteur de leur vie professionnelle.
« Se trouver sans cesse des défis »
Ils ont évolué au fil des ans. Didier Freinais a débuté comme vendeur dans un magasin, puis formateur produit, avant d’intégrer une société de service, dont il est un jour débarqué : « Une crise de jeunisme parce que je coûtais trop cher ! Mais un mal pour un bien : j’ai immédiatement rebondi comme commercial dans une centrale d’achats pour cuisinistes indépendants ».
Raynald Legrand, lui, a fait carrière dans une société de cosmétiques basée à Toulouse. Responsable commercial pour la France, il a sillonné l’Hexagone en long et en large pendant de nombreuses années, avant de franchir les frontières pour s’occuper de l’export, tout en dirigeant l’équipe des six commerciaux de l’Hexagone. « C’est une chance de travailler dans une PME qui, à 50 ans, m’a proposé l’export et la direction commerciale, ce qui m’a obligé à sortir de ma zone de confort. Un commercial doit se trouver sans cesse des défis. »
« On court moins mais mieux »
Avec la même énergie qu’à 20 ans, le quinqua bénéficie d’un atout majeur : l’expérience, sans compter le réseau qu’il a pu se constituer en restant dans le même secteur d’activité, comme Raynald Legrand. Une expérience qu’ils savent apprécier : « elle me manquait cruellement plus jeune, remarque Didier Freinais. Avec l’âge, j’arrive à ouvrir des portes qui seraient restées closes au début de ma carrière ». D’autant que le jugement s’affine : on s’acharne moins sur un prospect qui, visiblement, n’est pas intéressé.
Finie l’époque où le jeune Raynal Legrand sautait dans sa voiture à 18h pour répondre immédiatement aux désirs d’un client à Maubeuge. « Le client est toujours roi, mais on apprend à mieux le gérer, à le faire patienter, pour optimiser son temps de travail. Je me souviens d’un client de Hong Kong qui voulait me rencontrer alors que j’étais à Seoul puis à Tokyo. J’ai été capable de lui dire que cela n’était pas possible. Et finalement, c’est lui qui s’est déplacé. On court moins, mais mieux », résume Raynald Legrand. Un must, car le physique doit suivre, surtout lorsque la politique voyages de votre entreprise ne vous offre pas la Business class pour voyager à l’autre bout du monde. Mais pour lui, aucune hésitation « J'embaucherai sans problème un commercial de plus de 50 ans. En plus, à cet âge, ils sont libérés de beaucoup de contraintes, en particulier vis-à-vis des enfants. »
« La relation humaine compte avant tout »
Il n’empêche qu’il faut rester vigilant. Plus on avance dans l’âge, plus il peut devenir difficile de se remettre en cause, c’est humain. Le risque existe de s'enfermer dans un cercle, dans un réseau qui conforte dans l’idée d’avoir toujours raison, ou encore de devenir un simple preneur d’ordres. « J’accepte des initiatives de mes commerciaux dans lesquelles je ne crois pas, parce que je garde en tête que je peux me tromper, indique Raynald Legrand. Et je considère toujours mes clients comme d’éternels prospects, pour créer chez eux de l’envie, des besoins auxquels je pourrais répondre. »
Depuis leurs débuts, le métier a bien sûr évolué, notamment avec l'arrivée du numérique, qui permet de suivre son chiffre d'affaires et ses clients en temps réel, mais qui a induit aussi davantage de travail administratif. L’entreprise a toujours plus besoin de données, qu’il faut bien fournir. « C’est l'aspect du métier qui me lasse le plus », reconnaît Didier Freinais.
Pour autant, ni lui ni Raynald Legrand ne sont à l'abri d'une certaine lassitude, dans un univers économique compliqué qui rend toute prévision très aléatoire. Alors ce qui permet de se ressourcer, ce sont souvent les clients que l’on connaît, qui vous font confiance et qui vous apprécient. Comme le souligne Raynald Legrand, « la relation humaine compte avant tout ». Commercial un jour, commercial toujours !