Ce n’est peut-être pas très politiquement correct. Mais en entreprise comme ailleurs nous connaissons tous des boulets. Qui sont-ils, peut-on les manager, et sont-ils amendables ? De l'art délicat de manager les boulets.
« Mais quel boulet ! » Inefficaces, paresseux, prétentieux, mauvaises langues, rabat-joie ou juste… incompétents !, certains collaborateurs peuvent rappeler ces boulets soudés aux chevilles qui ralentissaient la marche des bagnards d’autrefois. Le premier réflexe du manager consiste à les éviter, ou à chercher à s'en débarrasser, notamment en transférant le mistigri à un autre service.
Ce qui n'est pas toujours possible, ni même souhaitable. En particulier parce que l'attitude du boulet peut être une forme d'expression de souffrance au travail, ou la réponse à une mise à l'écart pas toujours justifiée de ses collègues. Deux éléments à vérifier avant d’aller plus loin.
Le boulet manipulateur
Dans la pratique, tout dépend à quel boulet on a affaire. Le pire reste celui qui n'est jamais satisfait, dénigre tout le monde, à commencer par l'entreprise qui l’emploie. Celui-ci peut créer beaucoup de dégâts, jusqu’à casser une équipe, notamment en colportant des rumeurs. « Attention à ne pas entrer dans son jeu, prévient Josyane Halberstam, experte des personnalités atypiques, maître praticien PNL et master-coach certifiée. Il s'agit souvent d'un manipulateur, par exemple lorsqu'il critique l'entreprise en général. Il faut prendre du recul, essayer de le canaliser et remettre systématiquement les pendules à l'heure. »
Le boulet incrusté
Deuxième grande catégorie de boulets, celui qui fait partie des meubles, ce qui lui donne le droit — pense-t-il — de se considérer plus important qu'il n'est. Cultivant l’apparence de la plus grande occupation, dans la réalité il « déploie une très grande créativité dans la façon de ne pas faire », précise Josyane Halberstam. Généralement, il n'apporte pas grand chose à l'entreprise. Mais il faut parfois l’accepter. La solution consiste souvent à ne lui confier que ce qu'il connaît par cœur et qu'il exécutera de façon mécanique.
Cependant il peut s'agir aussi d'un “boulet malgré lui”, installé depuis bien trop longtemps dans son poste, faute d'avoir été valorisé ou promu en temps et en heure. Auquel cas il serait dommage de ne pas profiter de son expérience. « On peut éventuellement lui proposer de devenir mentor d'une jeune recrue ou lui confier une nouvelle responsabilité. » À condition qu'il ne soit pas trop aigri. Le mentoré ne tardera pas à en comprendre les limites, mais au moins aura-t-on pu gérer une transmission des savoirs.
Le boulet compétent
On peut avoir du talent et être considéré comme un boulet ! Dans cette troisième catégorie on trouve l'hyper compétent qui ne correspond pas aux normes, l'électron libre qui n'arrive pas à s'intégrer. Celui-là a été embauché pour sa culture, sa formation ou sa créativité, mais voilà, il peut faire l’unanimité contre lui car il refuse de se plier aux règles – y compris celles que ses ainés ont fini par accepter à contrecœur. « Il faut leur donner le maximum d'autonomie et leur laisser le champ libre pour que l'entreprise profite de leur créativité », estime Josyane Halberstam.
Le boulet gaffeur
Dernière catégorie de boulet : Gaston Lagaffe. Il accumule les erreurs, les maladresses, les faux pas. Pas question évidemment de lui confier des tâches stratégiques pour l'entreprise ! Il exige plutôt de mettre en place un système pour contrôler son travail, tout en opérant une rotation entre ceux qui seront chargés de vérifier ses tâches, pour éviter la lassitude des “contrôleurs”. Ce type de boulet n'est pas simple à gérer, surtout lorsqu'il est sympathique, qu'il essaye de bien faire et se montre serviable, au point de susciter de la compassion. Dans certaines entreprises, ce boulet peut finir par devenir… une mascotte !
Alors, non, il n’y a pas de formule magique contre les boulets. Mais il y a une arme pour éviter les pires : le bon recrutement.