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A Nantes, inspirés par les peintres flamands

Jeudi 18 Juin dernier, nous étions à Nantes pour une nouvelle édition de l’Art de Déjeuner. Récit d’un moment privilégié au château des Ducs de Bretagne, entre le clair obscur des peintres flamands et un éclairage original sur l’art du management.
#Formation #Déjeuner #Inspiration
30 juin 2015

Jeudi 18 Juin dernier, nous étions à Nantes pour une nouvelle édition de l’Art de Déjeuner. Récit d’un moment privilégié au château des Ducs de Bretagne, entre le clair obscur des peintres flamands et un éclairage original sur l’art du management.

De la gare de Nantes au château des Ducs de Bretagne, il ne faut pas plus de dix minutes de marche pour remonter sept siècles en arrière. Construit et reconstruit du XIVème au XVIIIème siècle, le château s’impose d’abord par ses épais remparts et ses puissantes tours de garde de schiste et de granit, reliées par un chemin de ronde de cinq cent mètres de long. Je rentre par le pont-levis de la place Marc-Elder, entre les deux tours jumelles du Pied de Biche et de la Boulangerie. Une hermine, une couronne ducale : bienvenue chez Anne de Bretagne.

Une fois franchis les murs épais et sombres du XVème siècle, tout change. Car la cour est immense et claire, dominée par un magnifique palais de tuffeau blanc. Je rejoins les invités dans le bâtiment du Harnachement, construit pour abriter l’artillerie, et consacré du 30 mai au 30 août 2015 à héberger les collections de peinture flamande et hollandaise du musée des Beaux-Arts de Nantes, lui-même en travaux depuis plusieurs années.

Deux groupes se forment, qui partent chacun vers un tableau. Cette fois, je fausse compagnie à Stéphane Coviaux, fondateur des Ateliers du Regard, pour suivre Emmanuelle Aupècle, conférencière, formée à l’histoire de l’Art à l’Ecole du Louvre.

Les salles associent elles-aussi clartés et obscurités, entre modernité des cloisons, murs de pierre et plafonds de bois blanchi. Un immense Rubens saisit le visiteur – c’est Judas Macchabée priant pour les morts, impressionnant. Un peu plus loin, je m’arrête sur une délicieuse huile sur bois d’Osias Beert où un singe capucin des indes orientales se régale d’une pomme et de noisettes.

Rencontre avec un tableau mystérieux

Sans présentation préalable de l’œuvre, notre guide nous propose un moment exclusivement consacré à une toile, attribuée à un peintre liégeois du début du XVIIème siècle, Gérard Douffet. L’aventure commence par trois minutes d’observation silencieuse. « Laissez-vous intriguer, faites confiance au tableau », nous dit-elle. Puis vient le moment du premier échange, dans une salle adjacente.

Pas question à ce stade de rechercher le sens du tableau. Il s’agit seulement de collecter les impressions des uns et des autres. L’exercice est réussi : bien qu’il me paraisse impossible de ne pas voir Jésus entouré des douze apôtres, nul n’y fera référence. Dans cette scène comme observée depuis le balcon d’un théâtre, les personnages présentent parfois des poses bizarres, et les détails abondent, comme le montrent la diversité des commentaires :

  • il y a plusieurs scènes dans le même tableau ; certains participent à l’action, d’autres pas,
  • que fait cet homme, « le contorsionniste », comme en lévitation dans une position très étrange ?
  • la profusion des couleurs,
  • une luminosité qui va croissant au fur et à mesure de l’observation,
  • le personnage blanc, sans barbe, dans une position peut-être soumise,
  • l’ambiance générale conviviale,
  • les ombres sur les dalles, les tapis d’Orient,
  • un gâteau unique en cours de partage,

Retour vers la toile et apparition du sens

Après ce premier échange, on revient à la toile, pour tenter maintenant de déchiffrer le sens de la scène. On étudie les échanges de regard, les gestes qui relient les acteurs du tableau, tout particulièrement autour du personnage principal, habillé en rouge.

Cet homme plus âgé qui, debout, fait un signe au plus jeune, c’est l’apôtre Pierre, qui demande au jeune homme vêtu de blanc – Jean l’évangéliste – de dire qui trahira le Christ – l’homme en rouge. Et Jean lui désigne le voisin de droite de Jésus, Judas, dont on découvre alors qu’il cache la bourse aux trente deniers. Pendant ce temps, des discussions privées continuent entre ceux des disciples qui n’ont pas suivi l’action… C’est alors que l’on prend conscience de la présence d’une coupe, curieusement noyée dans l’ombre alors qu’elle se situe sous la lampe.

Plus de doute possible : il s’agit bien d’une représentation de la Cène. Mais l’on constate que l’abondance de détails, et les quelques maladresse de l’artiste (tout particulièrement le bas du corps inversé d’un personnage couché à droite de la toile) pouvaient être propres à gêner la compréhension et entraîner vers de fausses pistes… Une situation finalement assez classique en management ?

Valorisation individuelle et collective

art-et-valorisation-des-hommesAprès avoir chacun observé deux toiles (voir ici l’article sur la nature morte de Pieter Van Overschie), les groupes se rejoignent dans la salle du rez-de-chaussée autour de Didier Zoubeïdi, Directeur marketing d’Edenred France, et de Stéphane Coviaux. On revient ensemble sur l’expérience vécue et l’on établit facilement des parallèles avec l’exercice du management. Parmi les remarques des participants :

  • un exercice nouveau qui s’est conduit avec naturel
  • après avoir craint de ne pas se sentir concerné, un intérêt qui est allé croissant
  • toutes les remarques étaient bienvenues, sans jugement
  • la facilité de parler avec simplicité d’un sujet dont on ne savait pas grand chose
  • le plaisir d’avoir pu prendre le temps de recueillir les impressions avant de chercher à rationaliser
  • la bienveillance du mentor a rejailli sur les participants entre eux
  • le tableau est vu différemment après que le groupe ait exprimé des idées différentes
  • la valorisation individuelle grâce à l’attention qui était portée à chacun, l’impression que ses mots comptent
  • la valorisation collective : l’addition de la parole de tous a apporté de la valeur et du sens

Nous allons, pour finir, partager un buffet au restaurant Les Oubliettes. La nuit s’annonce. Le château est à nous, et nous prenons le frais dans sa cour, entourés de ses bâtiments doucement éclairés. Une belle soirée propice à la réflexion et à l’échange.

*

Une dédicace particulière à la gentillesse du personnel des Oubliettes et aux gardiens du château.